Démarche
Mes masques ne sont pas conçus comme objets de décoration, mon ambition est de les voir vivre.
Faire un masque c’est, avant tout, répondre à toute une série de contraintes :
- L'intention, si il s’agit d’un archétype de la commedia dell’arte, quels sont les signes formels qui vont permettre de le reconnaître ?
- Dès le modelage, conscience qu’il ne s’agit que d’une étape pour faire un masque en cuir, or le cuir impose ses limites.
- Toujours la même distance entre l’ouverture des yeux du masque et les yeux du visage sur lequel je prends appui (sur mesure), car j’ai fais le choix que l’on voit bien les yeux du comédien.
- Equilibre entre stylisation (c’est un objet d’art qui va nous propulser dans un registre extra-quotidien), animalité (comme ingrédient de caractérisation) et justesse anatomique (parce qu’il s’agit avant tout d’un être humain).
- Est-il suffisamment neutre, afin de pouvoir se mettre dans tous ses états ?
- Enfin, et surtout, ai-je la sensation qu’il y a de la vie dans ce masque ?
Tel un père regardant son enfant, le facteur de masque voit sa création s’animer et lui échapper. Le masque a sa vie propre. Confectionner un masque, c’est passer de nombreuses heures à regarder cette objet inanimé, à le travailler dans le détail. Va-t-il fonctionner comme prévu ? C'est une fois porté qu'il pourra vraiment se révéler, mais, à cet instant, j'espère que le comédien me fera "oublier" qu’il porte un masque pour que le personnage m'emmène, avec lui, dans son monde.
Porter un masque est déjà, en soi, un acte ludique, et c’est dans cet esprit que chemine le théâtre de masques.
Le masque est un guide merveilleux pour qui sait l’écouter.
Pourquoi le Héron
Il y a des rencontres qui changent une vie...
Mon tout premier rôle fut le Héron dans La conférence des oiseaux.
A l’instar de mon premier personnage, je pris mon envol, emporté par la passion du théâtre. Je vais donc au théâtre comme le Héron va au Simorg.
« Le soleil de ma magesté est un miroir. Celui qui se voit dans ce miroir, il y voit son âme et son corps. Il s’y voit tout entier. Seriez-vous trente ou quarante, vous verriez trente ou quarante oiseaux dans ce miroir. »*
* La conférence des oiseaux: Conte Soufi d’Attar, adapté par Jean-Claude Carrière pour Peter Brook.
Rencontre du théâtre, rencontre du Héron, et enfin : rencontre des masques de Commedia dell'arte, d’abord portés et très vite fabriqués, le chemin se trace et le voyageur devient le chemin…